C’est sous un ciel dégagé, ce 25 mars, que plus de 20 000 militant.es militant des luttes environnementales s’étaient donné rendez-vous autour de la méga-bassine en chantier de Sainte-Soline (79). Une foule bigarrée, faite de jeunes et moins jeunes, tenant pancartes, banderoles, s’étirait alors, en file indienne, sur de longues lignes droites d’asphalte bordées de champs de colza. Déjà, luisaient, au loin, casques et boucliers des fantassins de la république dédiés à la garde d’un amoncellement de terre haut de plusieurs mètres.
Progressant vers leur but ultime, défendu, ainsi, par plus de 3000 hommes lourdement armés, les anti-bassines chantaient, dansaient et observaient, aux alentours, les terres arides : à perte de vue, la même désolation! Pas un relief où puissent s’accrocher les derniers nuages. Le remembrement était passé par là, cassant les bocages, privilégiant les « open Fields », , pour, déjà, une recherche de meilleure rentabilité. Seule cette maudite bassine, colline infertile façonnée par l’homme, émergeait. Cette volonté farouche des tenants de l’agro-industrie de s’accaparer, ainsi, l’or bleu, était maintenant, là, face à ces milliers de citoyen.nes venus dire leur colère devant la matérialisation concrète d’une voie sans issue. Ils ont osé ! Tout ce désordre pourrait prêter à sourire s’il ne se faisait au détriment de la nature, d’une grande majorité des paysans et, finalement, de la population toute entière. Quoiqu’il en coûte (en subventions notamment…), le jour venu, ces promoteurs de cratères artificiels, espèrent, pourtant, remplir l’équivalent de 250 piscines olympiques en puisant dans les nappes phréatiques, en pompant l’eau des rivières, en accueillant les pluies. Tout sera mis en œuvre pour assouvir le funeste dessein. De ces aberrations environnementales, ils ne tirent aucune leçon. Une quinzaine de bassines sont déjà prévues dans le coin. Alors, oui, certains se sont élevés contre tous ces aveuglements conscients.
La horde courroucée des anti-bassines était, d’ailleurs, arrivée au pied de l’ocre mur. Chacun y allait, alors, de son slogan dans une ambiance festive mais déterminée. Et puis, empêchée d’accéder au chantier par les cordons impressionnants d’hommes au service de la cause étatique, soutien inconditionnel des accapareurs, l’intifada commençait. Portée par une poignée de manifestants «déter», la colère, qui jusqu’ici, grondait, éclata. Dans un déluge de fumée, de grenades, de tirs en tout genre, le plus grand nombre se mettait aux abris… sans abris. La répression brutale s’abattait sans aucun discernement. Dans une joute disproportionnée, le légal frappait, au cœur, le légitime. Blessés graves, mutilations, panique : tout se confondait. Les médias feront, bientôt, gorges chaudes de ces affrontements servant le pouvoir en place. La forme, dramatique, cachait le fond, qui l’était tout autant.
Alors, quoi retenir de tout ce fatras? Le conflit fait conscience et la problématique de l’eau est un sujet que, peu à peu, nul ne pourra ignorer. Lorsque l’on sait que notre agriculture utilise plus de 50% de l’eau dans notre pays et que les sécheresses hivernales vont se multiplier, on ne peut que promouvoir un autre modèle agricole plus respectueux du vivant. L’agro-industrie industrie ne peut perdurer, mais avec une Politique Agricole Commune dont les subventions vont à 70% vers un modèle qui promeut l’agriculture intensive, c’est aussi à Bruxelles qu’il faut parler. En tout cas, le sujet de l’eau, crucial, ne concerne pas seulement les agriculteurs mais bien toute la chaine, du producteur au consommateur, dont l’estomac, pour le moment, est, souvent, le réceptacle de tous les produits phytosanitaires répandus sur les sols de nos territoires, devenus, eux aussi, de plus en plus pauvres au fil des ans…